Le FN est-il républicain ?

Publié le par L'UNION DES CITOYENS PATRIOTES

Libres propos de Philippe Bilger

Le recours au concept de République n’est-il pas devenu une invocation, une incantation et comme un aveu de faiblesse ?

Il y a eu d’abord l’annulation par Radio J de l’interview de Marine Le Pen à la suite des protestations du CRIF et d’Arielle Schwab pour l’Union des étudiants juifs de France (UEJF).

Pour Arielle Schwab, le Front national (FN) « reste structurellement antisémite, raciste et hors du champ républicain ».

Frédéric Haziza, responsable de cette invitation de Marine Le Pen pour Radio J, radio de la communauté juive, a en définitive dû céder aux pressions exercées sur lui. Sa démarche, tout de même, constitue un formidable progrès pour la liberté d’expression même si le processus n’est pas allé à son terme. Il convient de saluer à ce propos la seule opposition connue publiquement à cette censure imposée et satisfaite de l’être. Celle de Gilles-William Goldnadel qui n’a pas mâché ses mots, alors qu’il est un membre éminent du CRIF, pour dénoncer ce « bridage de la pensée, un manque de liberté d’expression, un déni de démocratie ».

On a envie d’encourager Radio J à poursuivre cette entreprise d’émancipation (JDD). On s’interroge aussi pour savoir ce qui serait advenu si les mêmes censures avaient été subies par des radios chrétienne ou musulmane. A l’évidence on aurait poussé des hauts cris !

 

Je relie cet épisode navrant justifié, selon ses instigateurs, par le fait que Marine Le Pen et le FN ne seraient pas républicains à diverses réactions suscitées par un récent sondage ayant ému l’ensemble de la classe politique, notamment l’UMP, à cause de la première place qu’il accordait à Marine Le Pen.

Le président de la République a refusé, pour les cantonales, toute union avec le FN de même d’ailleurs que tout Front républicain. Il n’empêche que deux ministres ont fait part de leur intention d’appeler à voter socialiste en cas de duel FN-PS. il s’agit de Nathalie Kosciusko-Morizet et de Laurent Wauquiez. La première, dont j’apprécie particulièrement l’intelligence et l’intégrité, a déclaré « qu’on s’adresse à tous les électeurs parce que tous les électeurs sont des Français, en revanche on ne s’adresse pas à tous les partis parce que tous les partis ne sont pas républicains » (Le Figaro, Le Monde, Canal plus, nouvelobs.com).

C’est cette récusation sans cesse assénée au FN et à ses responsables de n’être pas « républicains » qui mérite à mon sens une élucidation. Que veut-on dire par là ou bien est-ce seulement une facilité qu’on s’octroie ?

Cette question est d’autant moins oiseuse, sauf à considérer qu’une part importante de l’électorat en faveur d’un parti n’est pas une donnée essentielle, que le FN se situe dans notre espace démocratique, qu’il est reconnu politiquement, socialement, médiatiquement et qu’on s’escrime avec plus ou moins de succès à distinguer les citoyens qui le soutiennent en étant trompés et abusés et la hiérarchie de FN qui est inamendable. Il me semble, dans ces conditions, que l’effort intellectuel pour définir le caractère non républicain du FN ne peut pas se contenter de cette affirmation mais doit offrir une argumentation tenant compte au moins de sa légitimité dans notre vie publique. Cette explication, avec la fille de Jean-Marie Le Pen, sera plus complexe, moins aisée, parce que le père ouvrait un boulevard avec ses obsessions sur la Seconde Guerre mondiale et ses minimisations anti-juives. Marine Le Pen n’a-t-elle pas d’emblée « purgé » le FN en soulignant, comme pour ne plus y revenir, que l’Holocauste avait été le « summum de la barbarie », ce que Goldnadel avec bon sens avait rappelé, pour souligner que le père et sa fille ne pouvaient pas être traités de la même manière par les instances juives.

Force est alors de rattacher ce refus de considérer le FN comme un parti républicain à la nature même de la politique qu’il mettrait en oeuvre (Marianne). Ou, plus exactement, du climat idéologique qu’il diffuserait et qui ferait disparaître les mesures techniques derrière une atmosphère de haine aux antipodes de la fraternité, l’une des exigences de notre devise. Cette présomption de culpabilité est-elle si bien fondée quand par exemple la droite populaire au sein de l’UMP est infiniment proche du FN sur le plan de la sécurité et qu’Olivier Besancenot, pour le NPA, ne prêche pas la concorde sociale mais appelle clairement, quand on l’entend, à une guerre des classes et à un régime qui serait aux antipodes de notre démocratie tranquille et classique ?

Je reviens à mon propos initial. La commodité réside dans une réprobation morale par principe, qui évite d’entrer si peu que ce soit dans l’analyse de propositions et d’un programme qualifiés d’absurdes pour l’essentiel, mais dont la réfutation, d’une part, n’est pas si simple et d’autre part les mettrait au rang des projets à discuter, donc admis comme plausibles au même titre que les autres, perçus, eux, comme honorables. Ils bénéficieraient en quelque sorte d’une prime de respectabilité technique.

Le FN qui n’est pas républicain ? Une vérité ou une paresse ? Nommer le diable ou faire de la politique ?

 

Source http://www.nationspresse.info/?p=126294

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