Marie Neige Sardin : Les Mésaventures d'une Femme Courageuse

Publié le par L'UNION DES CITOYENS PATRIOTES ET SA JEUNESSE

Grande naïve devant l’éternel, je croyais qu’elle n’aurait jamais lieu, cette vingt sixième fois; non pas que je pensais  le quartier assaini de toute verminerie, mais tout simplement par confort moral, par zen attitude, par l’ espoir d’écrire un jour le mot fin à cette longue série.

Il en est ainsi de la nature humaine surmontant X traumatismes, pour poursuivre la route elle se forge une espérance, car faut -il craindre à chaque seconde, un danger invisible et inquantifiable?

Tout événement qui met en cause ma survie me confronte à l’absolu de mon anéantissement; sans doute l’épreuve la plus redoutable pour une victime multirécidiviste. 

De quoi est-elle capable, pour un peu de paix, moins de souffrance, conserver son intégrité physique et une fuite devant ses peurs intérieures: de tout, y compris de se laisser tuer pour qu’enfin, son Aie devienne un « A l’aide » transformant ainsi le dire de ses souffrances en appel.

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Un samedi ordinaire, un jour de marché prometteur puisque veille de premier mai et des clochettes du bonheur. je m’active dans la librairie, la quantité de presse à mettre en place est très importante, il est presque 8heures et donc je fais mon travail.

La sonnette de la porte est actionnée, je prends ma pile d’invendus et débloque la porte. La personne qui se présente n’a, au premier coup d’oeil, rien d’extraordinaire, un pantalon de survêtement bleu marine, un haut de la même teinte et un bonnet vissé sur la tête; je le prends sans souci pour l’un des hommes travaillant sur le marché.

Pourtant, mon corps m’envoie déjà des signaux d’alerte, ma gorge se noue, mes jambes tremblent, et mes yeux se mettent à fixer ces deux mains gantées trifouillant pour l’une dans le bas de jogging et pour l’autre me plaçant un sac de plastique blanc sur la caisse dans un silence assourdissant.

Mon regard se plante dans le sien. à cet instant précis je ne me pose plus aucune question, juste l’anticiper, le sonder, voire l’hypnotiser tel un cobra avec sa proie. Il braque un pistolet sur moi, petit ressemblant à un automatique ancien modèle, vrai ,factice, impossible de le savoir face au canon.

Il me réclame « un astro taureau et la caisse », tout en agitant fébrilement autant la poche que le flingue.

Ne quittant pas ses yeux, je prends donc  dans le présentoir le jeu réclamé; il semble se détendre puisque j’agis selon sa volonté, ma main droite s’approche de la sienne, puis brusquement, je lui plaque sa main armée sur le comptoir, ne plus être face à l’arme, pouvoir me faufiler et le planter là. Parvenue prés de la porte, je me retourne et le vois me mettre en joue. je m’engouffre sur le trottoir, vite la petite place du marché, les commerçants s’y activent et il y a des hommes. L’individu me suit le pistolet à moitié dissimulé dans son plastique blanc, se sentant un peu coincé il balance ce dernier sous un étale, puis se ravise , le récupère et parvient à me dire dans un parfait français  » je reviendrai, je ne fais jamais de bavure! » .

il part ainsi au beau milieu du marché, certains commerçants lui emboîtant le pas.

Libérée, je retourne à la boutique, je vomis, suis livide de trouille, toutes les émotions des 25 agressions précédentes me rejoignent, m’assaillent; je vais mettre une éternité à m’en remettre encore une fois.

Je n’ai pas déclenché l’alerte police que je paye pourtant tous les mois, tant j’ai perdu confiance en ces institutions aux valeurs inversées plus promptes à m’enfermer, me menotter, me blesser que de me protéger.

Pourtant je vais joindre sur son portable un des policiers municipaux, pas pour moi, dans ma démarche, mais pour le cas où l’individu ferait du mal à d’autres, il est de mon devoir de les protéger en le signalant.

Les caméras de la ville semblent parler, les témoins répondent présents et ne se défilent pas, monsieur le maire a passé un coup de fil m’informant de la tournure des choses, pourtant, pourtant, je demeure effarée, ma confiance est laminée; je ne peux oublier qu’une victime qui parle, s’exprime, dénonce, devient coupable à jamais.

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Tiré de son blog: http://le-bourget.over-blog.com/

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